[stag_toggle style=”normal” title=”Détails de la pièce” state=”closed”]Vierge adorant l’Enfant (Prière dans la forêt)
Copie d'après : Fra Filippo Lippi (1406 (?) – 1469)
Auteur: Ottilia Michail – Oteteleşanu (1885-1974)
Daté : 1911, en noir, en bas à droite
huile/bois;
dimensions : 1250 x 1150 cm
inv: 11629/ P 243 / Ps 20[/stag_toggle]
L'œuvre est une copie de l'original situé à la Gemäldegalerie de Berlin (à l'origine au Musée Dahlem de Berlin), réalisée en 1911 par la peintre Ottilia Michail-Oteteleşanu, pour la galerie de peinture du roi Carol Ier de Roumanie et fait partie du patrimoine artistique du château de Peleş.
La composition représente la scène de l'adoration de l'Enfant Jésus par la Vierge Marie, assistée de saint Jean-Baptiste enfant et de saint Bernard de Clairvaux, fondateur de l'ordre cistercien, avec la bénédiction de Dieu le Père. La silhouette des personnages s'inscrit autour d'une forme ellipsoïdale traversée par une ligne verticale, dont les rayons partent de l'Esprit Saint et sont dirigés vers Jésus.
Au premier plan, la Vierge agenouillée, vue de trois quarts, est placée sur le côté droit de la toile, adorant l'Enfant. L'Enfant, déballé, est assis sur un pré fleuri et porte un doigt à ses lèvres.
L'Enfant Jésus rejoint le côté gauche de la composition où saint Jean-Baptiste est représenté de face, le corps légèrement ondulant, la main gauche sur la poitrine, la main droite tenant une croix surmontée d'un long bâton portant l'inscription : « • ECCE ANGNUS DEI ECCE H ». À l'arrière-plan, saint Bernard prie sur un rocher, représenté uniquement en buste. La forme ellipsoïdale est complétée par la figure de Dieu le Père, les mains tendues en signe de bénédiction, sous le Saint-Esprit. Les personnages sont placés dans un paysage forestier jalonné de rochers et de ruisseaux. Remarquez le parcours intéressant, en forme de « S », formé à gauche par un rocher en gradins, comme s'il reprenait la position de saint Jean, et, en pendant, à droite, par un ruisseau avec de petites cascades.
La présence d'une hache plantée dans un tronc d'arbre, sur laquelle est inscrit le nom de Fra Filippo : • NACH FRATER PHILIPPUS • P fait référence à certains passages de Luc 3, 9 et Matthieu 3, 10, à savoir que « la hache coupera jusqu'à la racine les arbres qui ne portent pas de bons fruits ».
Fra Filippo Lippi, né en 1406 à Florence et mort le 9 octobre 1469 à Spolète, est considéré comme un peintre de la première Renaissance. Lippi fut influencé dans sa création par Lorenzo Monaco et surtout par Masaccio, qu'il rencontrait souvent au monastère des Carmélites de Florence et à la chapelle Brancacci. Plus tard, le bienheureux Angelico jouera un rôle déterminant dans sa formation.
Fra Filippo est célèbre pour ses nombreuses représentations de la Vierge, aux silhouettes élégantes et aux traits d'une finesse et d'une transparence remarquables. Il fut le maître de Botticelli, qui entra dans son atelier en 1465 et forma à son tour le fils de Filippo, le jeune Filippino Lippi, à la peinture.
L'œuvre signée Ottilia Michail-Oteteleşanu peut être considérée comme une copie de bonne qualité. Les couleurs, avec leurs fines touches de bruns et d'ocres, rehaussées de bleu délavé et de tons de rouge, respectant l'œuvre originale, confèrent à la scène personnalité et beauté.
L'original se trouvait à l'origine dans la chapelle du palais Medici-Riccardi à Florence et est apparenté iconographiquement et compositionnellement à deux autres panneaux pour l'autel du monastère d'Annalena (Florence, Musée des Offices) et à un autre pour le monastère de Camoldi im Casentino, tous deux réalisés par Fra Filippo, vers 1450-1460.
Ottilia Michail-Oteteleşanu (née en 1885 – décédée en 1974) est une artiste polyvalente, spécialiste de l'art de l'émail. Fille d'un éminent médecin d'origine aroumaine et de son épouse, Eugenia Raut, descendante d'une famille de nobles polonais installés en Roumanie après 1848. Son premier professeur fut Sava Henţia (entre 1899 et 1903). Dans l'entourage de la Maison royale, elle rencontre Nicolae Grigorescu (un ami de son père, Vasile Michail), qui lui conseille de partir étudier à l'étranger. En 1904, elle est présentée à la reine Élisabeth de Roumanie. Celle-ci la prend sous sa protection et lui offre une bourse pour étudier à Berlin. En 1905, elle commence ses études à l'École des Arts Décoratifs de Berlin, dans la classe de l'émailleur Hanns Bastanier (1885-1966). À Berlin, elle fréquenta la maison de l'écrivain Ion Luca Caragiale, en compagnie de son frère, pianiste de grand talent. Elle poursuivit ses études à Paris, à l'Académie Julian. Après ces études, elle devint peintre de la Maison royale et protégée artistiquement par la reine Élisabeth. Ensemble, ils peignirent des enluminures avec des textes bibliques et des miniatures d'une beauté particulière. En 1915, elle épousa Şerban Oteteleşanu, un noble de longue date, descendant des frères Buzeşti, anciens généraux de Michel le Brave.
Même après la mort de sa protectrice, la reine Élisabeth, Ottilia resta dans l'entourage royal, étant celle qui exécuta les derniers portraits des premiers rois de Roumanie, pour lesquels elle réalisa des études préliminaires au pastel.
Avant la Seconde Guerre mondiale, elle rencontra au château de Peleş plusieurs personnalités remarquables, dont George Enescu et Cella Delavrancea, Alexandru Tzigara-Samurcaş, pour qui elle réalisa même un portrait mémorable, au pastel, portrait offert par la famille de l'historien au Musée du Paysan roumain. S'ensuivit une période d'anonymat jusqu'aux années 1960, lorsqu'elle devint conseillère artistique du Patriarcat roumain, où elle fonda et coordonna l'atelier d'émail. De cette époque, les quatre grandes icônes impériales en émail, réalisées par l'artiste entre 1961 et 1964 et exposées aujourd'hui dans la cathédrale patriarcale, restèrent emblématiques.
Ottilia Michail-Oteteleşanu reste une créatrice talentueuse et dévouée à la peinture, comme en témoigne l'immense collection de plus d'une centaine d'œuvres, composée de gravures, de dessins, de peintures à l'huile, d'aquarelles et d'émaux, sauvées par ses descendants du gaspillage, ainsi que des documents familiaux.